C’est en dessinant les appartements de leurs clients qu’Agnès et Manuel ont commencé à s’intéresser aux éléments décoratifs de l’architecture. «Nous avions besoin d’inventer les subtilités qui font qu’un projet prend de l’ampleur et gagne en cohérence. Nous nous sommes mis à l’échelle du détail.»
Et parmi les détails – essentiels – il y a tous ces petits objets de la quincaillerie, les poignées de porte, les boutons de placard, les butées, les œilletons, etc. Pourquoi les condamner à la discrétion? Les designers aiment raconter l’histoire de leur photographe qui, à l’heure de garder un souvenir de sa grand-mère, a choisi une poignée de porte, parce qu’elle l’avait touchée toute sa vie durant. «C’est un objet qui rappelle des moments, des personnes, le genre d’objet qu’on aime emporter dans un déménagement.»
«Nous avons oublié tout ce qui fait une poignée pour mieux la repenser, expliquent-ils. Pour qu’elle affirme l’esprit d’un lieu, une présence. Pour qu’elle joue un rôle, et pas forcément le second rôle.» Faisant de l’assemblage le cœur de leur concept, ils ont exploré en parallèle les plaques décoratives. Jusqu’à créer de véritables collections, combinant formes, couleurs et effets de matière «pour que chacun puisse s’approprier l’objet et l’identifier à son projet».
Et puis il y a le laiton. Sa lumière les attire, à moins que ce ne soit son ombre. «Nous aimons le laiton pour toutes ses humeurs. C’est une matière vivante et versatile, parfois éclatante, parfois douce, parfois sombre. Elle reflète autant l’esthétique d’un intérieur que la personnalité de ses habitants.»
Au fil de l’aventure, ils ont trouvé de magnifiques savoir-faire dans des établissements chargés d’histoire, des ateliers à échelle humaine. «Nous tenions à ce que la production soit artisanale et locale. Nous avons rencontré des gens formidables qui ont compris le projet, nous avons développé de belles relations de confiance.»
À travers leur travail du laiton, à travers leurs collections, Agnès et Manuel renouent avec la tradition de l’ornement. Un art de la décoration qui les fascine.
Parcours en bref.
Agnès Cambus. Diplômée des beaux-arts de toulouse en 1994 en section Design industriel. Rejoint l’agence d’architecture de Christian Biecher à Paris. Elle y dessine le mobilier des nombreux projets d’aménagement, des objets pour des éditeurs et s’initie à l’architecture d’intérieure.
Manuel Bonnemazou. Diplômé de l’ensci (Les ateliers) en 1994. Part à New York où il explore le design industriel dans sa version américaine. Rejoint Habitat France pour diriger la création des luminaires. Puis travaille à Londres dans le bureau d’Habitat UK, sous la direction de Tom Dixon.
Agnès et Manuel fondent leur agence en 2003, avec pour activités principales la création d’objet, l’architecture d’intérieur et la scénographie. Ils s’associent pour élargir leurs compétences avec des amis graphistes au sein du collectif element-s, jusqu’en 2017. ils dessinent entre autres du mobilier urbain, un manège pour le Parc des Buttes-Chaumont, un poêle à bois pour Richard Le Droff, des packagings et des scénographies pour Pierre Hermé, un kiosque et du mobilier pour les monuments nationaux, de nombreux appartements à Paris ainsi que des boutiques et des lieux publics.
À partir de 2014 ils travaillent sur les « éléments de détails de l’architecture », réflexion qui aboutit à la création de la marque bonnemazou-cambus en 2017.
Ils se consacrent alors pleinement à ce vaste projet de design.